Qu’est-ce qui différencie l’autoconsommation de la formule de revente totale ?
Mickaël Feuildet – « Produire sa propre énergie, c’est maîtriser sa facture à prix constant. Avec l’autoconsommation partielle ou totale, on se questionne sur son niveau de consommation et sur comment on va mieux gérer les flux électriques entrants et sortants. On entre dans le domaine de la gestion de son énergie électrique. C’est un changement radical par rapport à la revente totale. Actuellement, la plupart d’entre nous subissons nos consommations. Nous payons la facture sans la détailler et souvent sans savoir si elle augmente et pourquoi : hausse des tarifs ou des consommations ? À cet égard, le déploiement des compteurs Linky devrait nous aider à y voir plus clair. »
La distinction entre vente totale et autoproduction va-t-elle persister ?
M. F. – « Sans doute pas. Nous sommes à la parité réseau (coût de revient kWh produit = prix d’achat du kWh). Les tarifs d’achat continuent à baisser. Il est très probable que la fin des tarifs réglementés arrivera dans moins de trois ans. Sauf si le coût des installations solaires continue à baisser, qui sera intéressé pour vendre moins cher que ce qu’il achète ? Cela ouvre la porte à d’autres formes de valorisations via l’autoconsommation individuelle ou collective qui commence juste à émerger, notamment avec des collectivités territoriales. Cela va évoluer très vite et il faut s’y préparer. »
Que conseillez-vous en matière d’autoconsommation ?
M. F. – « L’autoconsommation impose des études au cas par cas. En effet, la vente de l’excédent est peu incitative avec un prix de revente de 6 centimes fixé pour vingt ans (10 c si moins de 9 kWc), ce qui est inférieur au coût de revient. En aviculture, le vide sanitaire pose problème. Que faire de l’électricité, surtout si cela tombe en plein été ? On peut néanmoins choisir cette solution, en anticipant de futurs nouveaux usages. Si on peut stocker à bas prix, on peut tout envisager. En deux ans, l’investissement pour stocker 1 kWh est passé de 1000 euros à 300 euros. À moins de 100 euros le KWh, ce sera compétitif. Pour ma part, je préconise de commencer par expérimenter l’autoconsommation totale étape par étape. »
Et comment on s’y prend ?
M. F. – « En commençant par une micro installation, par exemple de 3 kWc. Cela permet d’apprendre à gérer ses flux d’énergies. À ce stade, on est sûr de ne pas être perdant. En 2017, avec l’Apepha et la Chambre d’agriculture de Bretagne, nous avons conçu un prototype d’un kWc posé au sol et facile à brancher (système « plug and play »). Avec moins de 1,7 m de hauteur et moins de 3 kWc, on évite la déclaration d’urbanisme et les délais de raccordement (gratuit). Malgré un coût de 1,48 euro du watt crête posé, on arrive à un kWh à 6,7 centimes calculé sur vingt ans (hors coûts d’exploitation qui sont minimes). La microcentrale est aujourd’hui une réalité. Depuis le mois de janvier, la startup néerlandaise SuperSola propose son panneau de 250 watts installable en cinq minutes pour environ 500 euros. »
Que penser des panneaux auto-orientés ou “trackers” ?
M. F. – « Du point de vue technologique, le tracker est très intéressant car en suivant le soleil comme un tournesol, il permet de produire 50 % d’énergie en plus. Mais, en raison du génie civil, des impératifs techniques et des coûts de maintenance, il revient au double d’une installation fixe de même puissance. Son intérêt économique est donc amoindri. Attention également à la prise au vent. En région ventée, la mise en sécurité à l’horizontale pénalise la production. Si on veut éviter le pic de puissance du midi en autoconsommation, on peut étudier la solution de panneaux fixes installés dans plusieurs positions, en fonction de son profil de consommation. »